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Par-là-par-ci

Vie et tribulations d'une citoyenne ordinaire

Le côut des règles : l’Assemblée et le gouvernement s’en tamponne.

Publié le 16 Octobre 2015 par Ju in A chaud !, Féminisme, Humeur, Egalité, Politique, Santé publique

Ce 16 octobre, c’est à une heure du matin, dans un hémicycle bien vide, qu’à été discuté l’amendement portant sur l’abaissement de la TVA sur les produits féminins de protection hygiénique (pour les non-initiés : les tampons, les serviettes hygiéniques, les coupes menstruelles, etc.). Derrière un sujet en apparence anecdotique, c’est une question bien plus complexe et chargée de symbole qui est soulevée.

 

A l’initiative du collectif Georgette Sand, une pétition - qui avait réuni plus de 17 000 signatures - a été remise à l’Assemblée Nationale. Cette dernière demandait d’abaisser le coût de la TVA sur les produits de protection féminine, considérant, à juste titre, qu’ils appartiennent aux produits de première nécessité. A ce jour, ces produits sont assujetis à un taux de 20% de TVA. On parle alors de la "tampon taxe".

Défendu par Catherine Coutel, vivement soutenue par Isabelle Attard, l’amendement a reçu un avis défavorable du gouvernement et a été rejeté par l’Assemblée.

 

L’expression d’une incompréhension ou comment mélanger les torchons et les serviettes (hygiéniques)

 

Les produits d’hygiène féminine concerneraient 15 millions de femmes en France. Comme l’a si bien souligné Isabelle Attard, ces produits amènent à “des dépenses contraintes et obligatoires”.

 

 Christian Eckert, secrétaire d’Etat au Budget, a expliqué bien maladroitement la position du gouvernement. Selon lui, abaisser le taux de TVA reviendrait à ouvrir “la boîte de Pandor”, sous prétexte qu’on percerait un boulevard à la renégociation des taux pour “le bois, les entrées de grottes, les parcs de loisirs”. Il a également ajouté que les produits d’hygiène concernant “plus particulièrement mais pas exclusivement” les hommes étaient taxés à 20%.

 

Pourtant, ce n’est un secret pour personne (enfin j’espère), les règles, à moins d’avoir quelque problème de santé que ce soit, aucune femme n’y échappe. Pas plus que les hommes à la pousse des poils sur le menton me direz-vous. Mais même mal ou pas rasés, ces messieurs peuvent allègrement vaqués à leurs occupations. QUID des femmes lorsqu’elles ont leurs rêgles…

Qu’est ce qui est le plus incommandant ? Une barbe foisonnante ou du sang s’écoulant librement entre vos jambes, tachant vos vêtements, le mobilier, et permettant de vous suivre à la trace dans tout vos déplacements (coucou la NSA !)?

 

Ces êtres, aussi étranges que fascinants, dotés d’un utérus à la muqueuse nomade n’ont alors guère le choix :  tampons et serviettes sont indispensables pour mener une vie un tant soit peu normale.

Donc comparer l’utilité d’un rasoir à celui d’une boite de tampons, c’est comme comparer celle d’une tablette tactile à celle d’un sac de pommes-de-terre…  Là où l’un relève du confort, l’autre relève de la première nécessité si bien que les deux n’ont rien à voir !

 

Mesdames, à vos porte-feuilles !

 

Autre raison invoquée par le gouvernement et les socialistes à l’Assemblée : le coût qu’une pareille mesure aurait pour l’Etat. Il s’élèverait à 55 millions d’euros ; Somme ma foi bien rondelette, qui plus est dans le contexte économique que nous connaissons. Néanmoins, il y a fort à parier qu’on les retrouverait dépensé dans d’autres produits de consommation.

 

Mais qui n’a jamais mis les pieds dans un rayon d’hygiène féminine aurait du mal à comprendre le coût exhorbitant de pareil outillage pour le porte-feuille d’une femme : comptez 4,50€ pour une boite de tampons et 3€ à 4€ pour un paquet de serviettes jetables. Les produits durables coutent le double si ce n’est le triple. D’accord, ce n’est pas la fin du monde. Cela dit, dans un budget à l’année, autant vous dire que cela vaut son pesant d’or (d’autant plus que pour certaines femelles, les règles nécessitent tout un équipement allant, pour une même période, du protège slip à la serviette de nuit hyper absorbande et du tampon “mini” au tampon “super plus”).

 

Un côut avéré pour les femmes, mais aussi… pour les familles ! Selon mes propres estimations, une famille composée au moins d’une mère et de deux adolescentes réglées injecte 150€/an de son budget sur le marché bien portant des tampons et des serviettes.

 

Résoluement - mais pas fatalement - un monde d’hommes

 

Exiger  pareille mesure semble donc tout ce qu’il y a de plus légitime. Hélas, dans un monde fait par et pour les hommes ( précisons que 73% de nos représentants à l’Assemblée sont dotés d’une paire de… XY !), elle ne semble pas encore avoir sa place en France. Son rejet témoigne d’une méconnaissance (si ce n’est d’un mépris) de ce que sont les femmes et de ce qu’elles vivent tous les mois. 

Hé oui Messieurs, les femmes ont du sang qui s'écoulent tous les mois dans la culotte ! 

On ne peut pas faire de l’égalité homme/femme un étendars et ne pas comprendre que les règles sont une contrainte naturelle, physique, matérielle et financière qui appelle à un coup de pouce de la part de l’Etat. Les femmes doivent composer avec, cela fait partie d’elles : légiférer sur le sujet et accorder un taux réduit, c’est reconnaitre leur corps pour ce qu’il est et s’éloigner de ses représentations chiméro-fantasmatiquo-égériques.

 

Ne baissons pas les bras ; il faut que nous continuions à investir l'espace politique de revendications qui touchent directement à notre féminité. C'est une façon de marquer notre différence, et ainsi d'avancer vers plus d'égalité dans ce monde fait pour et par des hommes.

 

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